Prise de position du forum pour les droits de l’homme en Israël/Palestine sur UNRWA
Cette prise de position a été publiée le 01.02.2024 sur le site du Forum pour les droits de l’homme en Israël/Palestine.
Un soutien pérenne à l’UNRWA est indispensable
Alors que l’UNRWA, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, est actuellement critiquée de toute part, nous affirmons en tant que Forum pour les droits humains en Israël/Palestine que l’assistance qu’elle déploie dans quatre pays du Proche-Orient, à commencer par l’aide humanitaire vitale qu’elle achemine et distribue dans la bande Gaza au mieux de ses capacités, doit être préservée et garantie financièrement sur la durée.
Nous saluons les investigations ouvertes par le management de l’UNRWA sur les agissements présumés de certains de ses employés durant et autour des actes terroristes du 7 octobre sur le territoire israélien. Il est primordial pour toute organisation de s’assurer que son système de controlling interne est fiable afin de garantir sa crédibilité et le financement de son travail à long terme.
Mais nous condamnons la décision spontanée d’une douzaine de pays donateurs de suspendre leurs financements destinés à l’agence uniquement sur la base d’accusations portant sur un petit groupe de collaborateurs.
Alors que la catastrophe humanitaire dans la bande de Gaza choque le monde entier, la suspension des financements aura une incidence sur l’aide apportée par l’UNRWA à plus de deux millions de civils – des enfants pour plus de la moitié – qui en dépendent pour survivre. Nous condamnons l’irresponsabilité de ce qui deviendrait une «punition collective» des habitant⋅e⋅s de la bande de Gaza pour reprendre les termes du directeur général de l’UNRWA, le Suisse Philippe Lazzarini. Les suspensions de financement annoncées contreviendraient en outre aux mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de justice (CIJ) le 26 janvier dernier, parmi lesquelles figure la mise en place de «mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture de services de base et d’aide humanitaire aux Palestiniens de la bande de Gaza».
L’UNRWA est la plus importante agence humanitaire dans la bande de Gaza et l’ampleur de l’aide apportée par cette dernière ne peut pas actuellement être fournie par d’autres agences travaillant sur place. Rediriger les fonds vers d’autres acteurs ne saurait pallier l’effondrement du système humanitaire à Gaza qui résulterait d’une suspension des fonds alloués à l’UNRWA. La surenchère à l’œuvre dans les propos tenus par des représentants du gouvernement israélien à l’encontre de l’UNRWA est, dans ce contexte, irresponsable.
Nous saluons l’initiative de la Commission de politique extérieure du Conseil national d’inviter M. Phillipe Lazzarini pour un entretien approfondi le 25 mars prochain à Berne. Tant que le fonctionnement de l’UNRWA dans son ensemble n’est pas incriminé, la Suisse n’a aucune raison de retarder les contributions financières qu’elle s’est engagée à verser à l’agence.
Cinq raisons de ne pas laisser tomber l’UNRWA en lui retirant ses financements:
Les communications qui ont conduit aux suspensions de financements se référaient à quelque 12 employés de l’UNRWA qui auraient participé aux attaques du 7 octobre. Si cela est confirmé, ces derniers devront être poursuivis pénalement. Mais il s’agit de 12 personnes sur un total de 13’000 employé⋅e⋅s de l’UNRWA dans la bande de Gaza.
Actuellement, alors qu’ils sont victimes des bombardements incessants de l’armée israélienne, «deux millions de civils à Gaza dépendent de l’aide critique de l’UNRWA pour leur survie au quotidien.» Ce sont les mots du Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.
Dans les faits, il n’y a pas d’alternative à l’UNRWA à court et moyen terme pour assurer l’acheminement massif d’aide humanitaire dont les Gazaouis ont actuellement besoin. La connaissance du terrain et les infrastructures gérées par l’agence rendent cette dernière indispensable. L’UNRWA est une agence professionnelle. Elle est pilotée par un management extrêmement rigoureux (avec le Suisse Philippe Lazzarini à sa tête) et elle est soumise à des contrôles internes et externes réguliers.
En temps normal et de manière générale, grâce à tous les services de base qu’elle assure, l’UNRWA contribue à la stabilité dans une région aux abois. Limiter les financements alloués à l’UNRWA, c’est donc prendre le risque d’embrasements incontrôlables dans plusieurs pays du Proche-Orient.
Les accusations portées contre l’UNRWA (plus que contre toute autre organisation des Nations unies) doivent toujours être considérées à la lumière des agendas politiques en temps de guerre. Une guerre se livre aussi, de part et d’autre, sur le terrain de la communication par le biais de diffamations ciblées. Seul un examen indépendant des accusations formulées permet de traiter ces dernières de manière crédible.
01.02.2024